Des royaumes berbères, sans importance notable, existaient sous l’occupation de l’Empire romain, toutefois certains, intérêt oblige, sont restés dans le giron des vainqueurs de Carthage.
Un des chefs berbères fera exception : Jugurtha (108.104) dont le nom "Yougarithène" signifiait "il les dépassait". Par sa bravoure, il se verra consacrer dans l’une des meilleures œuvres de l’historien romain Salluste, mais soixante-dix ans plus tard. Le titre du livre, La Guerre de jugurtha (Bellum Jugurthinum), illustre parfaitement l’aura de ce chef amazigh qui n’est autre que l’un des petits-fils du roi Massinissa qui livra une guerre sans merci à la puissance romaine durant plus de sept années. Trahi par son beau-père Bocchus, roi de la Maurétanie, il sera vaincu en 105 et fera l’objet d’une embuscade. Après avoir résisté farouchement à l’ennemi, il sera neutralisé et livré à Sylla, questeur de Marius le 1er janvier 105. il sera enfermé dans le "Tullianum" (même lieu où sera cinquante-cinq ans plus tard le chef gaulois Vercingétorix). Il jeûnera pendant six jours avant d’être étranglé.
A la suite de la mort de Jugurtha, Bocchus sera récompensé car Rome lui accordera le tiers occidental du royaume de la région comprise entre les deux Maurétanie (la tin gitane à l’ouest et la césarienne à l’est) et plus précisément dans l’actuel Oranie (ouest-algérien).
Les deux tiers restants seront divisés entre deux princes indigènes (berbères) locaux acquis à Rome que cette dernière gardera sous son administration directe le nord-est de la Tunisie appelée "Provinçia Africa". Après la défaite de Jugurtha, l’emprise de Rome sera très forte sur les princes vassaux qui seront même entraînés dans des guerres fratricides orchestrées par la puissance occupante qui appliquait la loi de la division pour régner. Lorsque la guerre opposera cette fois-ci les Pompéiens contre Jules César, ce dernier se verra combattu par Juba Ier. Disposant d’une solide armée composée de quatre légions organisées sur le modèle romain, Juba Ier avait sous ses ordres, outre les guerriers berbères plus de deux mille cavaliers ibères (espagnoles et portugais actuels) et gaulois. Zama, sa capitale était ornée de palais, de luxueux temples entourés de trois murailles. Il sortira vainqueur lors d’une grande bataille qui l’oppose aux hommes de César en 49. Il finira par être battu le 4 avril 46 à Thapsus et se suicidera le même jour avec son allié, le général pompéien, Metellus Scipion. Jules César procédera alors à un changement de son administration en triplant l’étendue de la province "Africa" lui ajoutant la Numidie orientale, actuellement l’extrême est de l’Algérie, et le Constantinois. En 25, Auguste organisa un vaste royaume de Maurétanie qui comprendra un territoire allant de la frontière actuelle algéro-tunisienne jusqu’au nord du Maroc (région du Rif habitée encore de nos jours par des Berbères). Il nommera, afin d’éviter toutes velléités, le fils du... vaincu, Juba II (25 av. J.-C.-23 ap. J.-C.). Elevé à Rome dès l’âge de 5 ans, il épousera l’une des filles de la grande Cléopatre et de Marc Antoine, Cléopâtre Séléné, élevée comme lui dans la capitale de l’Empire. Juba II installa sa capitale à Yol, ancien comptoir punique qu’il rebaptisera Caesarea, aujourd’hui appelée Cherchell (une région habitée par des Berbères chenouis en Algérie). Le nom de sa nouvelle capitale l’a été en hommage à Jules César. Devenue une grande métropole, Caesarea connaîtra une cour brillante et cosmopolite où les dieux grecs, berbères, égyptiens, romains et puniques étaient idolâtrés. On cultivait les terres et pratiquait une agriculture florissante ; les arts grecs avaient une importance particulière fort appréciée par Rome, Juba II ne l’était guère par ses sujets. Dès les premières années de l’ère chrétienne, des nomades Gétules (Berbères sahariens) s’attaquèrent aux villes en 17 av. J.-C., des Musulamès (Berbères de la Petite-Kabylie) s’insurgèrent contre le pouvoir central conduit par un Berbère déserteur de l’armée romaine, Takfarinas, ils menèrent une guerre de sept années, immobilisant même quatre généraux romains après la mort de Juba II, son fils Ptolémée le remplaça.
Dernier roi indigène de Maurétanie, il se conduira en fidèle vassal de Rome, mais son aveuglement lui sera fatal. Convoqué à Rome puis à Lyon par son cousin Caligula, il sera dès son arrivée pendu en 40. Ayant appris son assassinat et l’annexion de la Maurétanie à l’Empire romain, les Berbères se soulevèrent, mais ne pouvant poursuivre les insurgés, les Romains se cantonneront dans la région septentrionale appelée la Maurétanie tingitane, le Maroc oriental faisant partie de la Maurétanie césarienne. Ils laisseront les Berbères occuper l’ouest et le sud de l’actuel Maroc qui échapperont ainsi totalement à leur emprise.
RACHID YAHOU
Source: Agoravox