Dans son intervention, madame Tassadit Yacine, qui a bien connu de près le défunt, précise qu’Ali Sadki Azayku lui rappelle Mouloud Maameri, figure emblématique de la culture berbère en Algérie. Ce sont des figures qui dépassent les générations, annonce-elle. Les deux hommes avaient le mérite et la capacité d’utiliser leur éducation moderne en matière des sciences humaines en faveur de la cohabitation des cultures présentes en Afrique du nord à savoir, le berbère, l’arabe et le français, avec bien évidement les particularités qui distinguent chacun des deux figures du ‘’Maghreb’’ pluriel. Pour T.Yacine, Ali Azayku représente l’exemple de l’intellectuelle qui demeure fidèle à ses convictions et qui ne recule jamais. Dans ce sens, il a sacrifié sa liberté pour ses convictions.
De son coté, Claude Lefébure, connu par ses traductions d’une vingtaine de poèmes d’Azayku, met l’accent sur l’aspect littéraire de l’œuvre de ce rénovateur de la poésie amazighe du sud du Maroc. Il l’a qualifié de ‘’Poète de la solitude collective’’ car il aime écrire la nuit, seul, souvent en marchant et en cherchant des rythmes qui s’inspirent de la poésie amazighe de sa région natale. Mais, notre poète ne se contente pas de respecter la métrique de la poésie amazighe orale, il la bouscule de l’intérieur et lui donne un aspect nouveau. Si Lefébure réussi à traduire les poèmes d’Azayky, malgré les difficultés énormes que pose ce genre de travail, c’est par ce qu’il maîtrise le français dans sa dimension poétique et ait de bonnes connaissances en berbère du sud du Maroc, « Tachelhit ». Il considère que le texte qui est poème dans la langue du départ doit rester poème dans la langue d’arrivée.
La troisième communication est celle de Didier Le Saout. Ce chercheur, contrairement aux deux premiers, ne connaissait pas Ali Sadki Azayku à titre personnel. Mais lors des entretiens qu’il effectue avec les militants associatifs du mouvement amazigh au Maroc, le nom d’Ali Sadki Azayku revient régulièrement, avec des degrés différents, dans les paroles des interviewés. Selon D. Le Saout, l’arrestation et emprisonnement de cet intellectuelle, pendant plus d’un an, en 1981, à cause d’un article en arabe revendiquant la révision de l’histoire du Maroc, constituent un événement clé dans l’évolution du mouvement amazigh au Maroc. Suite à cet événement, l’image d’Azayku dépasse la dimension locale ou régionale (Souss) pour devenir, malgré lui, une figure emblématique de la revendication amazighe au Maroc. Cette unanimité amazighe autour de la personne d’Azayku s’affiche clairement au moment de la création de l’Institut royale de la culture amazighe (IRCAM) en 2001. Son accord d’être membre du Conseil d’administration de cet institut officiel motiva les autres militants de faire le même choix. Et même si l’IRCAM est, ultérieurement, contesté, la personne d’Ali Sadki Azayku demeure incontestable.
Les trois communications ont été suivies d’un échange important avec le public venu pour connaître et rendre hommage à ce symbole de la culture amazighe. Il se composait essentiellement des étudiants, chercheurs, et membres des deux associations.
Avant cette conférence, le public assista à la projection d’un film documentaire sur la vie d’Azayku réalisé par Ahmed Baidou. Ce film, qui retrace le parcours d’Azayku depuis sa naissance (1942) à sa mort (2004), contribua à donner plus d’éclaircissement sur la vie d’Azayku et sa vision à l’histoire du Maroc. Les témoignages de Paulette Galland, Ahmed Boukouss, Amouri Mbarek…et les amis d’enfance d’Azayku ont tous permis de mettre plus de lumière sur l’œuvre d’Ali Sadki Azayku.
En marge de cette rencontre, plusieurs associations comme Asays, Clud Adlis et Toulwa, ont tenu des stands pour faire connaître les objectifs de leurs associations. Aussi, la jeune peintre Malika Houzig (Gueldasent) participa à cet hommage par l’exposition de ses tableaux.
Par: Amazighnews