Monsieur le Ministre,
En consultant le site internet de votre Ministère (voir les liens ci-dessous) nous avons constaté que la langue amazighe ne figure pas parmi les matières programmées pour l’année scolaire 2010-2011. Le planning dévoilé par votre Ministère affiche l’arabe et le français comme seules langues à enseigner au primaire et au secondaire. Or, l’enseignement de la langue amazighe, depuis la signature de différentes conventions entre votre Ministère et l’Institut Royal de la Culture Amazighe (IRCAM), devrait se situer au cœur de vos engagements selon les quatre principes : la standardisation, la généralisation (horizontale et verticale), l’obligation, et l’alphabet tifinagh comme mode de transcription.
Monsieur le Ministre,
Si l’on suit les projections qui avaient été arrêtées, l’Enseignement de l’amazighe aurait dû conduire dans les huit années qui ont suivi sont introduction en 2003 à sa généralisation. Or, en plus du grand retard constaté dans la mise en œuvre de ce plan, l’absence, pour ne pas dire la suppression, de l’enseignement de la langue amazighe pour l’année scolaire 2010-2011 nous confirme les craintes exprimées par la société civile amazighe au sujet de la volonté du Conseil Supérieur de l’Enseignement de revoir la place de l’amazighe dans l’Enseignement marocain. Revoir, non dans le sens d’améliorer son enseignement, jusqu’ici très modeste, mais plutôt de l’enterrer. Aussi, depuis quelques années, les interviews de quelques hauts responsables concernés (Feu Mezyan Belfkih ou le Ministre de l’Education nationale) montrent que la promotion de la langue amazighe par l’enseignement ne constitue pas encore l’une des priorités de votre Ministère. Qui plus est, vos déclarations et celles de l’IRCAM pour apaiser les esprits, après les protestations du mouvement amazigh, n’apparaissent que comme de simples effets d’annonce après la publication du planning de l’année scolaire 2010-2011.
Certainement vous êtes au courant des études de l’UNESCO qui prévoient la disparition de la langue amazighe dans les 50 années qui viennent en cas où des mesures sérieuses ne seraient pas prises pour sa promotion. De ce fait, nous considérons que l’absence de l’amazighe dans les programmes de votre Ministère s’intègre dans le cadre d’une politique contraire aux suggestions de l’UNESCO, aux revendications des organisations des droits de l’Homme (FIDH, AMDH, OMDH, mouvement amazigh…), vise à éradiquer cette langue. Cette absence contredit également les recommandations du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) des Nations unies, adoptées lors de sa 77ème session tenue à Genève du 2 au 27 août 2010, qui demandent à l’État marocain d’intensifier ses efforts de promotion de la langue et de la culture amazighes, notamment par son enseignement.
Or, la langue amazighe, comme toutes les langues du monde, est avant tout un patrimoine humain et sa disparition serait un « génocide culturel » dont vous assumerez une part de responsabilité. Pour nous, Marocains et Amazighs d’Afrique du nord, cette langue avec sa culture, forgent notre identité historique et marquent notre particularité dans le monde. Son enseignement et sa promotion au Maroc contribueront à vérifier l’amorce d’un processus démocratique dans notre pays.