Trois années déjà. Trois ans que tu es parti cher compagnon de combat. Cher Nba...
Ce soir, je rentre chez moi, dans la solitude de ce moment de nostalgie, de douleur et de tristesse. Je me suis arrêté un peu, pour essayer de contenir mes pensées et l'ampleur de ce passé qui me submerge tout d'un coup.
Dans mon esprit, j'ai encore l'image de ta mère qui te pleurait. Chaque fois que je la remémore, des larmes me submergent, me noient dans mon sentiment de chagrin. J'y vois ma mère, j'y vois la dignité de cette terre qui refuse de se plier malgré la cruauté du temps et des hommes. Je la vois dire au monde, que la montagnarde peut encore enfanter la vie dans la dignité.
Déjà trois années que nous avons pleuré ton départ, que je t'ai pleuré. Je m'en rappelle comme si c'était hier. Justement, c'était hier, comme si rien n'était. Je continu à écouter tes chanson comme si rien n'était. Mais, je me ressaisi et je me rends compte que la réalité en a décidé autrement. Elle est cruelle, comme l'ont toutes les vérités. Tu es bien parti. Tu nous as quittés. Tu t'es décidé d'aller rejoindre ce lointain horizon que tu as toujours chanté. Que tu n'avais jamais cessé de poursuivre.
Peut-être que tu t'es dit que c'était le moment de partir. Nous laisser à notre sort, à affronter nos démons et nos peurs pour une fois. Nous obliger à soulever nos yeux qui ont fixé les abimes de la terre depuis longtemps pour se rappeler de la dernière fois qu'on a soulevé les yeux vers le ciel. Oser crier notre douleur et parler de ce qui rend nos vies insupportables. Tu étais le premier à oser affronter les brulures du soleil. Oui, tu t'es rendu compte que nous avons passé trop de temps dans l'ombre de nos vies et de l'histoire. A force, le monde a fini par nous oublier. L'histoire, elle, a fini par nous bannir de ses souvenirs. Celle-ci s'est résignée à nous abandonner sur le bord des routes de la déchéance que sont nos vies. Nous, ces âmes abîmées, qui sont habituées au silence et à la prière de l'absent.
Cher Nba, je sais que tu t'es réveillé un matin en te disant : ce peuple ne se saura jamais reprendre son histoire sans avoir à pleurer et à revivre des deuils qui auront à faire revivre en lui l'amour de la vie et, surtout, l'ivresse de la liberté....La dignité de faire partie de l'histoire de Zayde ouhmade et Adjou mouhe.... Ainsi, tu as affronté ces démons que nous avons toujours craint : La peur d'exister autrement que dans l'habille des damnés de la terre.
Dans ce froid qui semble couvrir la tristesse de ce ciel en deuil, je marche essayant de disparaitre dans ce brouillard qui m'entoure. Je m'interroge, je me questionne. Es-tu vraiment parti pour toujours, sans retour aucun ? Ou c'était ta façon de nous dire que c'est à nous désormais à supporter les brulures du soleil. Que la liberté ne se marchande pas. Que nous sommes condamnés à rendre compte de l'héritage de tous les martyrs de ce peuple ? Maintenant, tu en fais partie. Chacun d'eux a su graver la colère de son âme sur les rochers de l'injustice et du mépris. Chacun a rendu l'âme pour célébrer la vie sur cette colline. Pour que les mariages auront à être encore célébrer sur les rivières de cette rivière solitaire. Que nos mères puissent encore chanter des berceuses aux enfants de cette montagne en pleure. Toi aussi, tu le savais. Tu n'es pas mort. Tu es juste parti pour veiller sur nous de là-haut, comme à tes habitudes. Tu as toujours aimé t'envoler avec les cygnes pour embrasser l'infinité des horizons de la liberté et de la dignité. Tu as chanté pour nos âmes assoiffées de justice et de vie.
Je lève mes yeux vers ce ciel attristé en ce moment précis. Je le contemple, la lune se retourne vers mois essayant d'éclairer la solitude de mon âme... Nba est parti certes, mais, avant de nous quitter, il a pris la peine de vous aimer et de chanter votre silence....Il a ouvert cette porte qui semblait inabordable, mais ci-nécessaire si vous voulez être digne de l'amour de cette terre qui a su vous enfanter du ventre de l'impossible.
Salut l'artiste, repose en paix !
Hassan Oumada
http://oumada.wordpress.com/