Dans le cadre de ses activités scientifiques, le master « Langue et culture amazighes » et « l'équipe de recherche en culture et langue amazighe » à la faculté des lettres et des sciences humaines, université Ibn Zohr d'Agadir ont accueilli le mardi 19 novembre 2014 l'enseignant chercheur Mr Hamid Souifi, chercheur au centre d'aménagement linguistique à IRCAM, dans une conférence plénière sous thème : « Aspects morphosyntaxiques des unités significatives de la phrase en tarifit ».
Cette rencontre scientifique a commencé par la présentation biographique faite par le Professeur Mr Abdelâali Talmenssour, coordonateur du master et membre de l'ERCLA, une présentation qui a souligné le profil scientifique riche de l'intervenant : participation au processus d'aménagement de la langue amazighe au Maroc depuis 2005, publication d'une série d'articles et études scientifiques à propos des linguistiques amazighes, participation à l'élaboration des manuels scolaires d'enseignement de l'amazighe, participation à la formation des différents cadres d'enseignement de la langue amazighe au Maroc (enseignants, formateurs, inspecteurs pédagogiques), supervision des projets de fin d'étude (licence, master, doctorat), encadrement de modules de langue amazighe et de sa syntaxe à différentes universités marocaines, animation des exposés et des conférences auprès des associations marocaines, participation à de multiples émissions radiophoniques...
Au départ, le Professeur intervenant Mr Hamid Souifi a précisé que son point de départ est la variante « tarifit » ainsi que la grammaire fonctionnelle du français, en signalant que son exposé va traiter les trois éléments principaux suivants : le syntagme nominal, le syntagme verbal et le syntagme prépositionnel.
L'exposé de Mr Souifi s'est focalisé sur la présentation des résultats des recherches scientifiques sur la phrase en tarifit, l'énumération des unités syntaxiques dans la phrase en tarifit et la détermination de rôle de chacun de ses constituants. Egalement, Mr Souif s'est intéressé de la présentation des différents problèmes liés au syntagme en tarifit qu'il soit : un nom, un verbe, une préposition. Tout en soulignant l'importance d'étudier les différentes divergences entre les variantes de la langue amazighe, chose permettant – selon son analyse - l'enrichissement de cette langue toute entière.
- Le syntagme nominal :
En partant de plusieurs exemples, Mr Souifi a montré les changement qui touche le nom dans les principales variantes de l'amazighe dans le cadre d'une dialectologie comparative :
Comme mot de réponse, on peut trouver les éléments suivants : argaz (en tachlhit, mot libre), d argaz (en tarifit, mot accompagné de modalité d'orientation « d »), ur d argaz (en tachlhit, l'énoncé négatif est accompagné cette fois-ci de particule d'orientation)...Une chose qui mène à poser la question suivante : en tachlhit, pourquoi la modalité d'orientation est absente à l'énoncé normal (affirmatif) alors qu'elle est présente dans l'énoncé négatif ?
Les modalités de rapprochement ont pris une place importante dans l'analyse de Mr Souifi, il a montré ses différentes formes ainsi que ses différents usages. A travers des exemples, il a précisé que l'emploi de « a » comme modalité de rapprochement dans « argaz a » est un emploi faux puisqu'elle n'apparaît pas dans les situations suivantes :
- Absence : argaz lli, argaz nni.
- Les pocessifs : baba inu
Il s'agit donc, selon Mr Souifi, d'un simple flottement ou changement de « i » en « a », l'expression « argaz a » n'est pas finie, à l'origine c'était « argaz n d », ce qui a donné « argaz ad ». L'intervenant a aussi remarqué que la modalité d'orientation, en tarifit, est éloignée dans les noms (exp : aryaz a), en contre partie, elle est dans les verbes de mouvement (exp : yucka d, yusi d). Le processus d'aménagement de l'amazighe a décidé de restituer le « d » de rapprochement dans les noms comme dans les verbes. L'état du nom (libre, d'annexion) a aussi attiré l'intention et la réflexion de l'intervenant.
- Le syntagme verbal :
Dans ce niveau, Mr Souifi a mis l'accent sur l'usage actuel de la langue amazighe, tout en rappelant des usages qui ne respectent pas les règles de standardisation de l'amazighes (utilisation actuelle de l'amazighe aux stations radiophoniques). Avec le projet de régionalisation avancée, l'intervenant a insisté sur l'importance d'adopter des cultures amazighes régionales à côté d'une langue amazighe unifiée et standardisée selon les normes internationalement reconnues. En plus, l'exposant a traité les différents thèmes verbaux en tarifit à travers des multiples exemples précis et comparatifs en défendant l'existence de cinq thèmes verbaux à savoir : l'aoriste, l'accompli positif, l'accompli négatif, l'inaccompli positif, l'inaccompli négatif. Tout en appelant à leur adoption tous dans le processus d'aménagement de la langue amazighe avec des distribution de rôles.
Les constituants de la phrase en langue amazighe sont également abordés dans l'exposé scientifique fait par Mr Souifi, il s'est interrogé sur les formes canoniques à adopter en signalant que cette problématique a fait l'objet des recherches du feu Cadi KADDOUR notamment dans sa thèse de doctorat intitulé : « Transivité et diathèse en tarifite : analyse de quelques relations de dépendances lexicale et syntaxique» (Thèse soutenue à l'Université de la Sorbonne Nouvelle, Paris III, en 1989-1990 sous la direction du Professeur David Cohen, publiée à titre posthume par IRCAM en 2006), l'intervenant a traité les ordres suivants :
- VSO : yuzn urgaz tabratt.
- SVO : argaz, yuzn tabratt. (ordre localisé chez les touarègues).
- Le syntagme prépositionnel :
A partir des différents exemples, l'exposant a expliqué des multiples phénomènes liés à la préposition en langue amazighe d'une manière générale et en tarifit particulièrement. Ici, il a mentionné les travaux du chercheur français Lionel Galand à cet égard. L'intervenant a attiré l'attention de l'auditoire à propos de la double préposition (i+n) avec les exemples suivants :
Tinoacin ns---------ins --------i ns
Baba nu --------- baba iw ( n se change en i).
L'emploi ironé de la première personne, l'exposant a présenté les exemples suivants :
Yuzn iyi/iyi d/i d/ iyd.
Isbdd i / ayi .....quelque chose.
Yuzn uma idrimn i nkki / issk wama tinoacin i ncc.
Un riche débat et fructueux a suivi l'exposé de Mr Hamid Souifi, auquel ont participé des universitaires ainsi que des étudiants.