Le livre, intitulé « Patrimoine maure (amazigh) du Maroc., vient d'être publié par la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines saiss de Fès. Il correspond aux actes du colloque international sur le patrimoine maure (amazigh) du Maroc organisé à Fès en mars 2013 par l'Association Medistone Maroc et l'Université Sidi Mohamed Ben Abdellah de Fès. Il est entièrement consacré au patrimoine amazigh antique, il avait pour but d'établir l'état des lieux de la recherche sur la question, de soulever les problèmes en suspens, et de proposer de nouvelles pistes de recherche. Le livre comporte une préface, les mots d'ouverture, les CV de 3 grands archéologues honorés et 26 articles dont 15 en Français, 1 en espagnole et 08 en arabe.
L'étude bibliographique montre que les sites les mieux couverts par les investigations sont aussi les plus connus (Volubilis, Lixus, Banasa) auxquels s'ajoutèrent des sites moins connus mais riches sur le plan de l'archéologie maurétanienne (Tamuda, Rirha, ...). Dans ces sites, les études ont principalement porté sur la céramique, les monuments religieux (mausolées et temples), les monnaies, et, dans une moindre mesure les inscriptions libyques (tifinaghe).
La production plus proprement historique s'est limité aux recherches sur le royaume maure (IIIe siècle A.C. – 40 P.C.), cela dans deux axes principaux : les rois de Maurétanie d'une part, les tribus maures amazighes d'autre part. Dans le premier, on s'est occupé surtout de la généalogie des rois, de la chronologie de leurs règnes et de la nature de leur royauté. Bien entendu, ce sont les règnes de Juba II et son fils Ptolémée qui ont été les plus étudiés, mais des hypothèses intéressantes ont été avancées sur les autres rois maures, s'appuyant surtout sur des données numismatiques (monnaie). Les travaux sur les tribus maures ont porté sur leur localisation, mais aussi sur la nature de leurs relations avec l'autorité royale puis romaine (traités de paix avec les Baquates et les Macénites). Le volet économique, à cheval entre l'archéologie et l'histoire, a, lui aussi fait l'objet de quelques travaux, basés notamment sur l'étude de la céramique, des fours de potiers et des pressoirs d'huile. Les divinités maures ont, de même, fait l'objet de quelques investigations.
La conférence introductive a abordé l'histoire et civilisation maurétaniennes » qui ont permis de faire le point sur des questions d'histoire et d'historiographie coloniale, ou sur des aspects problématiques et de réflexion. C'était l'occasion de présenter la carte des sites amazighes préromains qui présente une quinzaine de site d'agglomération amazighe.
Le livre comporte des articles qui traite :
• les aspects de l'architecture et de l'urbanisme maurétaniens, à propos des sites de Volubilis, Lixus et Rirha.
• l'économie et Numismatique »,
• l'artisanat à Tamuda, de pressoirs à huile de Volubilis, de potiers de Banasa, avant de déborder sur les voies maurétaniennes dans la péninsule tingitane,
• la numismatique a éclairé le numéraire de Juba II, et d'un trésor monétaire, découvert en 1993 et resté non-étudié, aujourd'hui déposé au Musée de Timgad, et qui comprendrait 75 pièces de monnaie de Juba II et 106 pièces de Ptolémée. «
• l'iconographie et la statuaire de Juba II et de Ptolémée continuent d'intriguer les chercheurs qui essaient d'en tirer des interprétations historiques.
• les divinités amazighes et le culte impérial sont toujours des thèmes ouverts à de nombreux questionnements.
• les inscriptions libyques ( tifinaghe) gardent encore des secrets, que l'étude comparée des inscriptions occidentales (Maroc) et orientales (Tunisie-Algérie) pourrait aider à les élucider.
• Enfin, il n'est pas vain de poser la question de savoir, à propos des populations maurétaniennes du Bronze final et de leurs contacts avec les marins phéniciens, s'il s'agit de colonisation, de commerce ou d'acculturation ?
Ne passons point sous silence deux articles à caractère très technique, l'une sur la méthode pétrographique de la céramique de Banasa, qui a permis d'obtenir un grand nombre d'informations sur la composition minéralogique des tessons, sur l'origine des matières premières et sur la technique de fabrication; l'autre sur le suivi des paramètres microclimatiques du mausolée d'Imedghassen d'un roi amazigh (Batna, Algérie), afin de montrer la relation entre ces paramètres et la détérioration de la pierre.
On le voit, le bilan, sans être encore bien lourd, est loin d'être négligeable, et promet de s'enrichir de plus en plus grâce aux travaux entrepris par de jeunes archéologues et historiens dynamiques.
S'il est pertinent de dresser le bilan des recherches sur le patrimoine maure amazigh, il est peut-être encore trop tôt pour parler de synthèses, sinon partielles, sur la période maurétanienne. Cependant le livre présente les différentes facettes du patrimoine et de la civilisation amazighe préromaine.
Notons qu'un autre colloque international sur le patrimoine préromain de l'Afrique du nord vient d'être organisé à Fès et a connu la présentation d'une cinquantaine de communications. Celles-ci se traduiront par des articles qui seront publiés incessamment sous forme d'un livre.
Said KAMEL
Président de l'Association Medistone-Maroc